Maurice Marius RIBES 1892/1915

Maurice Marius, fils de Jean et de Louise ANDRIEU, est né le 22 juillet 1892 à Arzens (Aude), village du canton de Montréal, à une quinzaine de kilomètres à l’ouest de Carcassonne. Ses parents quittent Arzens assez rapidement pour s’installer dans un village proche de Carcassonne: Grèzes puis à Trèbes.

 

Il réside encore avec ses parents à Trèbes en 1912, où il exerce le métier de cultivateur quand il passe devant le conseil de révision à Capendu. Son n° matricule est le 374/Narbonne, contrairement à ce qui est inscrit sur la fiche du SGA. Il est ajourné puis affecté aux services auxiliaires pour faiblesses et palpitations, dévelop-pement musculaire insuffisant.

 

Après le début de la guerre, il est re-convoqué devant le conseil de réforme du 8 décembre 1914 et, comme la France manque de poitrines à opposer aux canons allemands, Maurice est classé «apte au service armé». Il est alors incorporé au 55ème R.I. (Pont Saint-Esprit (Gard)- Aix-en-Provence) à compter du 15 décembre 1914.

 

Après une période de formation, il passe au 59ème R.I, le 12 mars 1915. Il appartient à la 34ème Division d’Infanterie et forme la 68ème Brigade d’Infanterieavec le 88ème RI (17ème C.A.)

 

Il rejoint son régiment qui se trouve en Champagne dans le secteur de Somme Suippes     


 

Le 59ème RI participe à la bataille des frontières en passant par Vienne-la-Ville (12/08), Landres, Somerance, Laudreville (14/08), Rémouville, Barricourt, Tailly, Moulins, Autreville (19/08), Carignan (20/08), Belgique, Offagne, Jehonville, Sart, Auloy, Jehonville, bois de Sart.

Le combat du 22 août dans le bois entre Sart et Auloy lui cause de très nombreuses pertes; sont tués le colonel, 3 officiers supérieurs et les 2/3 d’officiers subalternes. Un tiers de l’effectif total du régiment est tué, hors de combat ou disparu. Les journées des 20-22 août étaient étouffantes de chaleur (JMO).

Il est de la retraite par Muno, Messincourt, Sachy, Brévigny, Mairy (24/08), la ferme des Cogneux, Thelonne, combats de Noyers (27/08), de Bulson, de la ferme de Beumesnil.Durant ces combats, le régiment perd son lieutenant-colonel nommé depuis la veille et de très nombreux hommes. Il est réduit à 1330 h. sur 3000. Il continue sur Marqueny (30/08), Vaux-Champagne, Saint-Hilaire-Le-Grand (2/09), Châlons, Soudé (4/09), Attigny, Saint-Hilaire-au-Temple

 

Il participe à la bataille de la Marne (6–13 sept.) à Morevaux: ferme de la Certine, ferme de Croix, ferme le Buisson de Grenoble, ferme de Galbaudine, Vouciennes (11/09), puis Croix-en-Champagne Perthes-lés-Hurlus, Les Hurlus.

Le 16 septembre, le régiment reçoit un renfort de plus de mille hommes. Le nouveau commandant du régiment est tué par un obus le 25 septembre avec la plupart des officiers de son état-major par un obus tombant sur le PC.    


Une fois le front stabilisé, le régiment participe fortement aux aménagements de celui-ci en Champagne devant le villages des Hurlus: cote 189, bois Couperet, Perthes-lès-Hurlus, Tranchée Blanches, moulin de Perthes

Les 3 et 7 novembre environ 500 hommes de renfort intègrent le régiment. Certains proviennent de la réserve du 259èmeRI (de Pamiers) et plus d’1/3 de régiments territoriaux. Il est à noter que «ces hommes arrivent pourvus d’un pantalon de toile bleue qui recouvre le pantalon rouge» (JMO du 3/11) ?

Le 6 décembre, il passe sur le front de la forêt d’Argonne: Four-de-Paris, La Harazée, La Chalade pour participer à une offensive du 9 au 11 décembre.

Le 16 décembre, il retourne sur le front de Perthes les hurlus. Le régiment participe à l’attaque de quelques tranchées le 21 et 22 décembre. Par la suite les hommes gardent les tranchées, et toutes les nuits participent à des travaux d’aménagement et de consolidations des ouvrages sous le harcèlement de l’artillerie ennemis. Chaque jour on relève quelques tués et des blessés.

Le 28 décembre le régiment reçoit 3000 pantalons bleus, 65 pantalons en velours, mais aussi 6000 boutons !!!

Le mauvais temps persiste, le froid, la boue rendent pénible toute activité.

Suite à la prise du village de Perthes par le 88èmeRI au cours du mois de janvier, les travaux continuent et s’amplifient. Il gèle de manière intense. De nombreux cas de congelures des pieds sont constatés (telle celle du Sous-lieutenant trébéen Bernard SURRY).

 

Le 25 janvier 600 pantalons de velours, plus chauds, sont distribués.     


Offensive, le 2 février, après l’explosion de 2 mines (600 kg de cheddite), mais sans résultats probants. L’attaque est reprise le lendemain, suivie d’une contre-attaque allemande. Le 4, les hommes aménagent les entonnoirs.

Le 10 février, après quelques jours de repos le 59ème RI remonte en ligne. Mais pour une «journée calme», on relève quand même 2 tués et 15 blessés. Le 17 février, nouvelle attaque du 1er bataillon qui permet une avancée de quelques dizaines de mètres pour un bilan humain très lourds: 30 tués et une centaine de blessés. Le 18, nouvelle attaque pour de meilleurs résultats, mais un bilan tout aussi lourd: 38 tués et plus de 130 blessés ou disparus. Le 19 les Cies reçoivent l'ordre de tenir sur les emplacements conquis «coûte que coûte».

 

Le 22 février, un contingent de 73 hommes arrive en renfort de Foix. Le 23, il neige. Le 25, le 59ème RI est relevé, il cantonne à La Cheppe. Le 1er mars, le régiment est de retour sur le front. Il participe à une nouvelle attaque sur la cote 204 et la «Maison forestière». Le 10 mars, il est relevé et cantonne à Suippes. C’est là qu’il accueille plus de 850 hommes en renfort. Le 10: 238 hommes du 14ème RI, le 11: 33 du dépôt de Foix, le 14: 217 du dépôt du 55ème RI situé à Pont Saint Esprit dans le Gard dont Maurice RIBES, il est affecté au 2ème bataillon, 5ème Cie, le 15: 305 hommes d’un dépôt de Privas.

 

Le 16 mars, retour en ligne: garde des tranchées et travaux de nuit reprennent. Quelques tués et blessés chaque jour. De nouveaux renforts arrivent: 38 hommes le 19, 15 hommes de Foix le 22. Le 24 au soir la Marseillaise est chantée en cœur, ponctuées de «vivats» en l’honneur de la victoire russe de Przemysl. Le 26 mars relève et cantonnement à Suippes. Le 30 remplacement du 88ème RI en premières lignes. Il neige. Reprise des chantiers sur les tranchées, placement de chevaux de frise en avant de la ligne.     


2 avril le 59ème RI quitte le front et gagne Saint-Rémy/ Bussy, puis le 3 à Braux. 4 avril: Pâques. Le 5, marche pénible sous la pluie jusqu’à Fleury/aire. Le 6, marche jusqu’à Lemmes. Le 7, repos. Le 8 repos, mais travaux de propreté et «marche d’entrainement» sans sac, sur 20 km sous les ondées et le giboulées.

 

La 34ème division est citée à l’ordre du jour de la IVème Armée: «Pendant 5 mois de lutte acharnée, de combats et d’assauts incessants, sur terre comme sous terre, le jour comme la nuit, la 34ème division a réussi à arracher à l’ennemi, pied à pied, plus de 2 000 m de positions fortifiées sur 1 500 m de front, sans que les allemands en dépit de leur défense acharnée et de leurs contre-attaques violentes n’aient jamais réussi à lui en reprendre une parcelle de terre enlevée de haute lutte ». Le chiffre des morts et des blessés n’est pas cité et on est loin des grandes percées espérées (NdR).

9 avril: une fête est donnée en cet honneur avec concert place de la mairie, concert un peu gâché par la pluie.

10: marche sous la pluie vers Pretz. Des renforts arrivent continuellement.

11 : marche, puis repos à Neuville/ornain le 12 avec corvées de nettoyage et exercices physiques jusqu’au 21 avril. Le 14: distribution de 1900 pantalons bleus.

Le 22 avril: embarquement en train à Revigny et arrivée à Hargicourt le 24. Cantonnement à Ignaucourt et à Camon jusqu’au 29 avril. Le 30 avril embarquement en train à Moreuil pour Pernes. Le 1er, 2 et 3 mai marche sur Noyelles-Vion et Avesnes-le-comte.    


Le 59ème RI prend le service de garde dans les tranchées de Roclincourt, le 5 mai 1915: 2ème bataillon dans les tranchées, 1er bataillon à Ste-Catherine, au nord d’Arras et le 3ème bataillon à Pont-de Gy. L’ennemi enserre Arras, de jour en jour plus menaçant. Le Commandement a décidé de prévenir l’action allemande par une opération de dégagement de la ville. Le 6 mai, le bataillon nettoie et aménage les tranchées. Le 7, préparation de l’assaut, le 88ème en tête. La préparation de l’artillerie étant insuffisante l’assaut est retardé. Le 8 ? (page du JMO absente), mais c’est le jour de la mort d'un «pays» le sous-lieutenant Bernard SURRY. Ce sont alors les sanglantes journées des 9 au 13 mai 1915. Le 9 mai, le 59ème doit donner l’assaut derrière le 88ème R.I., mais la 5ème Cie, celle de Maurice, et la 8ème participe en tête. D’un seul bloc les vagues du 88ème franchissent le parapet sur les traces du colonel. Et les hommes voient fondre, en un clin d’oeil, les files successives, fauchées par les mitrailleuses allemandes. Peu d’hommes arrivent aux défenses accessoires ennemies, l’attaque échoue. Cependant à 13 h 45, le Commandement fait savoir qu’une nouvelle attaque aura lieu à 16 h. C’est le 59ème qui cette fois donnera l’assaut. 

La nouvelle circule rapidement dans la tranchée, chacun prend sa place en silence dans le parallèle de départ et pense aux 1.200 camarades du 88ème, de l’assaut précédent, tombés devant les fils de fer intacts. Malgré le bombardement allemand, malgré le crépitement des «maxims» qui frappent tout ce qui bouge encore, on entend distinctement des plaintes et des appels.  


 

15h30 ! Le moment approche et l’ennemi, attentif, semble redou-bler de vigilance comme s’il s’apprêtait à recevoir un nouveau choc. Cependant 20 mn plus tard, les abois des 75 précisent à chacun son devoir. A 16 h, au cri «En avant», la première vague du 59ème apparaît sur le parapet. Comme si un signal électrique les avait averti, de toute la tranchée ennemie, les mitrailleuses allemandes, toutes ensemble ouvrent le feu. Fauchés à quelques mètres de leurs tranchées, les hommes du 59ème ajoutent encore à la tuerie. Ceux, -les rares– qui ne sont pas atteints, se couchent et s’immobilisent ! L’attaque échoue. 

 

Le lendemain, l’attaque est reprise. Au petit jour le colonel se rend au poste d’observation de Roclincourt et est blessé dès son arrivée. Le commandement passe à un chef de bataillon et le colonel du 209ème R.I. prend la direction des opérations. A 17h, «tambour battant», les hommes sortent des tranchées pour se porter en avant. L’ennemi, que rien n’a affaibli, s’acharne sur ces nouvelles cibles. A 18h, nouvel essai, nouvel insuccès. Avec la nuit reviennent quelques survivants du massacre, la capote déchirée par les balles des mitrailleuses, qui, toute la journée, ont fouillé sauvagement la terre. Ces efforts successifs ont épuisé les nôtres, mais affolé le commandement allemand renforce les lignes devant Arras et remplace les troupes fatiguées par des troupes d’élite fraîches. Aussi, quand le 11 mai, l’attaque est reprise pour la 5ème fois, dans des conditions identiques, les fractions des 1eret 2ème bataillons qui franchissent les parapets sont aussitôt prises sous le feu des mitrailleuses. Les deux chefs de bataillon sont blessés à la tête de l’assaut. Les éléments désorganisés, privés de commandement, ravagés par les tirs allemands qui crépitent sans arrêt, sont bloqués à 30 m du parapet de nos tranchées, s’y cramponnent un instant, mais sous le feu de plus en plus violent de l’artillerie ennemie sont obligés de se replier dans la tranchée de départ. Si les pertes sont lourdes, si les officiers disparaissent, l’énergie des hommes reste digne de tous éloges. Et quand à 19h, un nouvel assaut est tenté, les débris du 59ème R.I. fournissent un nouvel effort et arrachent une centaine de mètres aux mains de l’ennemi.  


 

Vient la nuit qui permet d’organiser cette conquête malgré les contre-attaques allemandes. «Ce n’est pas assez, continuez !» a dit le Général, et le 12, le 13, le 14 et le 15, le 59ème continuera son effort… Le 15 et le 16 mai, les journées sont plus calmes, le régiment en profite pour améliorer les défenses.

Pendant cette terrible période, du 9 au 17 mai 1915, 16 officiers et 460 hommes sont mis hors de combat, ce qui vaut au 59ème une citation à l’ordre du jour du 17ème C.A. mais la suprême récompense: la victoire, n’a pas été donnée au 59ème qui n’a pu réaliser que des progrès insignifiants en compensation de son formida-ble effort. Maurice a la chance cette fois de «passer au travers des gouttes».

 

Le 18, le régiment est relevé. Il a le droit à la douche (de fortune) et un grand nettoyage à Pont-de-Gy. Il semble que la révolte sourd. Le JMO, le 5 juin, note: «à la suite de constatations d’inscriptions sur certaines planchettes des tranchées occupées par la 11ème Cie, telles que «Vive la Paix...» d’une part, et à des écarts de langage auxquels se seraient laissé aller certains hommes de cette unité au cantonnement de Pont-de-Gy (un sergent traduit en conseil de guerre et condamné à 1 an de prison), le Commandant de la 10ème Armée a adressé l’ordre de répartir la 11ème Cie dans d’autres régiments de la 10ème armée...»


 

Le 21 mai, retour sur le front jusqu’au 27 sans incident notable. Le 27 le régiment est relevé et le 2ème bataillon cantonne dans la caves des maisons de la grand’Place d’Arras. La ville est sans cesse bombardée. 1er juin: Départ pour un cantonnement à Berneville. Un contingent de 131 hommes vient renforcer le régiment. Prise d’armes. Du 2 au 6 juin, retour à Arras. 7 juin, le régiment reprend le service de garde des tranchées. Le 8, 9, 10 juin les échanges d’artillerie sont permanents. Le 10, un contingent de 198 hommes vient en renfort. Le 11 une pluie intense détériore tranchées et boyaux et oblige à des travaux importants de remise en état. Les échanges d’artillerie sont permanents et chaque joue 5 à 10 hommes sont mis hors de combat .   


Le 13 juin, les hommes doivent réaliser d’importants travaux de terrassement afin d’assurer la réfection des tranchées et de préparer les 14 et 15 juin une offensive.

Le 16 juin: attaque surprise à 12h15, mais l’artillerie allemande enraye l’attaque qui est reprise à 19h. Les sections avancent de 40 à 50 m. Le 17 juin à 2h30, reprise de l’attaque sans progrès nota-bles. Des bombardements intenses troublent toute la nuit du 17.

Les 18, 19, 20, 21, 22 garde des tranchées, aména-gements, fusillades et bombardements permanents. Nuit du 22 au 23 juin: relève et cantonnement à Wanquetin. 23 juin: Repos, nettoyage, travaux de propreté, préparation de la revue. 24: revue.

25, 26, 27, 28 juin: Exercices sous un temps couvert et pluvieux.

Dans la nuit du 28 au 29, le régiment remonte au front. Le 29 juin: garde des tranchées, c’est le 5ème Cie qui est en 1ère ligne.

30 juin : pluie abondante et éboulement des tranchées.

1er juillet: Abondants tirs d’artillerie allemande.

Dans la nuit du 1er au 2 juillet la 5ème Cie est relevé par le 7ème. Le 2 juillet, arrivée d’un nouveau contingent de 204 hommes. Le 3 juillet mise en œuvre de travaux considérables de défense, signe probable que les offensives sur ce secteur sont suspendues.

Le 4, un minen tombe sur une corvée de la 5ème Cie

Les 5 et 6, les hommes subissent de très violents bombardements. Toutes les tranchées sont bouleversées. C’est de l’avis de tous le plus violent subi depuis l’arrivée du régiment dans ce secteur.

Le 7, 8, 9, 10: journées calmes. Le 11 juillet, le régiment est relevé et le 12 le régiment cantonne à Simencourt…

 

 

 

 

Il a plu durant tout le mois de juin, il fait parfois froid… mais les hommes en premières lignes sont équipés de matériel contre le gaz. Que se passe-t-il précisément pour Maurice RIBES ? (quelle maladie nécessite son évacuation ou est-ce une conséquence d’un gazage ?) A quelle date Maurice a-t-il été évacué ?


Maurice Marius RIBES décède officiellement d’une broncho-pulmonie contractée au service le 12 juillet 1915 à 17 heures dans l’hôpital militaire de Doullens, installé dans la forteresse. Il est âgé de 23 ans et n’a passé que 4 mois au front.   

Il est inhumé dans une tombe individuelle, n° 28 – 8ème rang, du cimetière de Doullens (fiche matricule).

 

Son décès est transcris sur le registre d’état-civil de la commune de Trèbes à la date du 29 septembre 1915.

 

Son nom est inscrit sur le Monument aux morts de la commune de Trèbes