Alexandre CLERGUE 1878/1916

Alexandre CLERGUE, fils d’Auguste, journalier, cultivateur, décédé avant 1898, et de Catherine LAGARDE, est né le 6 octobre 1878 à Vilhac Aiguillannes (hameau de Lesparrou) (depuis 1915 commune de L’Esparrou, puis Lesparrou) en Ariège 09), petite commune à l’est du département, riveraine du département de l’Aude.

 

Lors du conseil de révision de sa classe, en 1898, à Lavelanet, il se dit cultivateur, résidant à Vilhac Aiguillan-nes avec sa mère. Son n° matricule au recrutement est le 740 / Foix - Ariège.

 

Il effectue son service militaire au 59ème R.I. (Pamiers-Foix) à compter du 14 novembre 1899. Après un an, le 23 septembre 1900, il est rendu à ses foyers, son frère étant également au service.

 

En octobre 1901, il est domicilié à Azille (Aude – 11). Il se marie le 4 septembre 1902 à Malves-en-Minervois avec une trébéenne Augusta Paule BARDY, fille de François, tuilier et cultivateur et de Marie-Anne ROCH, née en 1884 à Trèbes. Ils s’installent à Malves et ont au moins un enfant, une fille prénommée Agnès, née vers 1905 à Malves-en-Minervois. Il est cultivateur.

 

Il décède le 10 mai 1916 à Montauville (54) au lieu-dit «Côte 304» à Esnes-en-Argonne (Meuse – 55), à l’âge de 37 ans.

 

Son frère Clément, né en 1876, est décédé en 1925, probablement des suites de 44 mois passés au front.


A la mobilisation, il a 35 ans. Mobilisé le 4 août, il rejoint le 125ème Régiment d’infanterie territoriale auquel il est affecté et qui est encaserné à Narbonne (179ème Brigade – 90ème div. territoriale).

 

Alexandre participe-t-il aux opérations de surveillance des cô-tes et de la frontière espagnole ? Part-il en Afrique du Nord ? Est-il rapatrié avec des milliers d’autres fin septembre 1914 ?

 

Toutefois, le 5 octobre 1914, il est affecté au dépôt du 96ème Régiment d’infanterie qui se situe à Béziers puis incorporé au 296ème R.I. (132ème Brigade d’Infanterie; 58ème DI d’octobre 1914 jusqu’en déc. 1915, puis à la 152ème DI jusqu’en janv. 1917; 1er Groupe de Réserve)

 

Le 296ème RI, après 3 étapes, est conduit en auto à Avesnes-le-Comte, et arrive au milieu de la nuit à Noeux-les-Mines pour aller cantonner à Noyelles et à Nazingarbe, le 13 Octobre occupant les tranchées face à Vermelles. Le secteur qu'il doit occuper est à peine reconnu, qu'il reçoit l’ordre d’attaquer Vermelles, par sa face sud (6ème Bataillon,), le 5ème Bataillon qui a occupé les tranchées de premières lignes entre le Chemin d'Annequin à Vermelles et la Route d’Arras, coopérant à l’attaque. Pendant 3 jours et 3 nuits, le Régiment, en butte à de violentes contre-attaques, progresse de tranchées en tranchées, de maison en maison, car toutes sont organisées défensivement. Toutes ses unités repoussant toutes les tentatives ennemies subissent d'assez lourdes pertes (88 tués et plusieurs centaines de blessés ou de disparus). 

A  Avant 1913        Château de Vermelles      Après Dec 1914   V

A  Fosse n° 10          v  Brasseie de Vermelles


La situation se stabilise le 16, il a faveur d'un brouillard intense, et, à partir de cette date, le Régiment dont l’Etat-major cantonne au Philosophe, faubourg de Vermelles, va se livrer à une conquête méhodique de la fosse 10, du village (notamment la brasserie) qui exigera une succession d'efforts persévérants, combats et travaux d'organisation.

 

Octobre et Novembre se passeront ainsi, la Division progressant lentement et payant assez chèrement ses avances successives, tout en préparant l'attaque de la clé de la résistance, le château de Vermelles.

 

Alexandre CLERGUE rejoint le front le 3 novembre avec un groupe de renfort de 350 hommes. Alexandre est affecté au 6ème bataillon et à la 22ème Cie. Un nouveau détachement de 112 hommes rejoint le régiment le 26 novembre.

 

Les semaines précédentes, des travaux de mine ont été exécutés avec le concours des mineurs du pays. Dès qu'ils ont été mis au point, le commandant la Division donne l’ordre d'attaquer le Château. Le 1er décembre, l’attaque est faite par le 6ème bataillon. La compagnie d’Alexandre (la 22ème) y participe. Elle est déclenchée dès l’explosion d’une mine préparé sous le mur du Château. Les hommes franchissent l'amoncellement des décombres, gagnent rapidement le mur nord du parc et occupent quelques maisons voisines, mais ceux qui veulent progresser à l’ouest du Château, sont stoppés par les défenseurs de la maison Bréon, organisée défensivement. Il sera nécessaire d'amener un canon pour les déloger. La 19ème compagnie coopère à l’opération en poussant à gauche un peloton à 150 m, en avant de nos tranchées à peine ébauchées, appuyé par des mitrailleuses.

 

A 12h 30, le succès a été obtenu avec des pertes légères, mais des hauteurs de Hulluch, l’artillerie ennemie commence  arroser nos positions d’obus qui font des pertes assez sérieuses. A la nuit un calme relatif se produit et nous restons sur les positions conquises, malgré une contre-attaque sérieuse repoussée à 23 h.

 

Du 2 au 6 décembre, le 296ème continue les travaux d’organi-sation sous la canonnade et la fusillade occasionnant encore quelques pertes. Le 6 décembre un lieutenant lors d’une reconnaissance, trouva les tranchées ennemies de l’ouest du château inoccupées, 2 compagnies des 5 et 6ème bataillons occupèrent ces tranchées, l’ennemi étant encore à la lisière S.O. de Vermelles. Le 7, dès le matin, à la faveur d'un brouillard épais, le 296ème occupe la lisière du village que l'ennemi a abandonné. Vermelles reste acquis.

 

Les jours suivants se passent dans un calme relatif, à l'organi-sation défensive du secteur. Le 14 décembre, le 5ème  batail-lon fait un bon de 500 m et occupe N. D de Consolation; le 17, nouveau bon de 600 m, (21ème compagnie). Dés lors le 296ème  va continuer les travaux d'organisation de la position, un bataillon se trouvant en ligne, avec P.C. au Rutoire, l'autre au repos à Noyelles.

 

Certains soldats des 280ème et 296ème, en seconde ligne durant la nuit de noël, entendirent provenant du secteur anglais des chants, des clameurs, et virent de nombreuses fusées lancées de part et d’autres, mais pas de fusillade (d’après les carnet du caporal Louis BARTHAS).

 

L'hiver se passera ainsi, avec quelques alertes, des fusillades et des bombardements intermittents, des reconnaissances de nuit au cours desquelles il subira quelques pertes, et des travaux de terrassement et de défense où les soldats ne cessent de faire preuve de la plus belle activité, et du plus grand courage. Alexandre est de ceux-là.    


Le 296ème RI reste en Artois, dans le secteur de Vermelles, Hulluch, Aix-Noulette jusqu’en mars 1916

 

Le 9 mai 1915, il participe à l’attaque d’Hulluch, avec le 280ème, sans résultats. Elle reprend le 11, progresse au début, mais est bientôt enrayée. Le 13, un obus allemand, tombe sur le PC du Rutoire, faisant de nombreuses victimes (4 tués, 5 blessés), puis les Anglais, étendant leur front, le régiment appuie à droite, pour leur céder son secteur.

 

Fin mai, au cours de travaux d'aménagement pour la liaison avec les Britanniques, le régiment subit encore quelques pertes, puis cédant à nouveau son secteur aux Anglais, va se reconstituer à Houdain, pour aller relever le 2 juin, dans le secteur de Noulette, 2 bataillons du 149ème.

 

Les tranchées sont en piteux état, une odeur épouvantable s'en dégage; des flancs, des retranchements et des parapets émergent des débris de cadavres que le régiment va recouvrir de chaux la nuit, car on ne peut faire le moindre travail de jour, le plus petit indice d'occupation, déclenchant immédia-tement bombardement et fusillade.

 

Le 5 juin, une attaque ne donne aucun résultat. Elle est reprise à 23 h, mais aussitôt arrêtée. Le bombardement intense par obus de gros calibre cause des pertes sérieuses. Le commandant la Division, à qui le régiment vient d'être rattaché pour ces opérations spéciales, ordonne de nouvelles attaques. C'est le Font de Buval, qui doit être le principal objectif. Le 296ème y éprouvera des pertes très sensibles, l'abordera, mais ne pourra s'y maintenir. Beaucoup d’hommes y disparaîtront ou y trouveront la mort sans « profit » appréciable.

 

La 19ème compagnie fut presque entièrement anéantie, la 18ème y subit des pertes cruelles. Privés de leurs chefs, les éléments engagés hésitent sous un feu violent, s'aplatissent dans les trous d'obus. Ralliés par un lieutenant et un sergent, ils effectuent rapidement un barrage de sacs à terre et repoussent les contre-attaques, pendant qu'à droite, le 6ème bataillon, essaie vainement de progresser.

 

Le 5ème bataillon reçoit l'ordre, au milieu de la nuit, de reprendre l'attaque. Une section, envoyée en reconnaissance, à 2 h du matin, arrive en rampant jusqu'à 30 m du Font de Buval, mais est balayée par les grenadiers allemands et ne rejoint ses  lignes qu'avec les plus grandes peines. Finalement le Commandant de la Brigade prend sur lui de surseoir à toute nouvelle tentative; tous les éléments qui avaient pu prendre pied dans la tranchée allemande avaient été tués ou faits prisonniers.    

Le 7 Juin, l'attaque est reprise à droite par le 6ème bataillon; même bravoure, même insuccès. Le capitaine de la 22ème cie tombe et, rapporté  dans la tranchée de départ, meurt en disant : « Adieu, ma brave 22ème, vive la France ! ».

Electrisés par son exemple, toutes les fractions disponibles s'élancent en avant. Nouvelles hécatombes infructueuses. La 22ème avait changé trois fois de chef en 24 heures. Alexandre pour cette fois encore semble avoir échappé au pire.

Le 8 Juin, au cours de la relève du régiment, le commandant du 6ème bataillon est blessé, et  évacué.

 

Quelques jours de repos à la Fosse 10, puis vers le 17, le 296ème prend la relève dans le secteur d'Angres. Au cours de travaux de réfection des tranchées, sous un violent bombardement, il va subir de nouvelles pertes.


Le 11 juillet, il cantonne à Hersin en réserve, et le 18, il prend la relève en première ligne. Juillet et Août se passent dans le même secteur, le 296ème alternant entre les tranchées et les cantonnements, sans cesse bombardés, de Bully-Grenay.

 

Fin Août, relevé, le régiment s'embarque pour Beyens et West-Capel. Il reçoit des renforts, se reconstitue, et pendant un mois s'instruit au camp de Bergues; le 25 Septembre, il s'embarque à Esquelbecq pour l'Artois.

 

Une offensive est déclenchée ce même jour. Le 296ème est alors en réserve sur les bords de la Scarpe. Du 29 au 4 octobre, il cantonne à Mareuil, puis monte en ligne aux tranchées de l'Elbe et de la Vistule, améliore les travaux de défense et prépare une attaque. Elle se produit le 11; toutes les unités du 5ème bataillon y subissent des pertes assez sérieuses, et, en butte à des feux croisés de mitrailleuses, elles  ne peuvent guère progresser et sont soumises à un violent bombardement.

 

Le 30 octobre le régiment de gauche ayant été violemment attaqué, le 296ème lance des contre-attaques et les éléments de tranchées perdues sont reprises.

 

Tout novembre et décembre se passent dans le même secteur, avec quelques combats et quelques pertes. Le début de décembre est particulièrement pénible à cause de la pluie persistante; les hommes ont de la boue jusqu'aux genoux, leur ravitaillement est difficilement assuré.

 

Le 20 décembre 1915, le régiment intègre un bataillon supplémentaire, provenant du 280ème RI et passe à la 152ème division. Il est alors à l’instruction pendant de longues semaines, et le 28 janvier 1916, il est passé en revue par le Général en chef.    


En février, il est en secteur au Mont Saint Eloi, dans des tranchées bouleversées, soumises à un bombardement continu. La neige se met de la partie, quelques hommes ont les pieds gelés. Cette période pénible se termine le 9 mars, les Anglais viennent relever le régiment pour lui permettre de préparer sa participation à la bataille de Verdun.

Le 27 avril, le Régiment est réuni à Condé-en-Barrois.

 

Le 5 mai, il est transporté en auto et jeté dans la fournaise.

 

Dés le 9 Mai, le régiment occupe la partie Est du Secteur d'Esnes, jusqu'au ravin de la Hayette, (ouvrages de Miramas et de Tarascon). Sous un bombardement constant, qui cause des pertes sérieuses, sous la pluie, il s'évertue à réorganiser des défenses et des abris qui ont disparu, repoussant avec sang-froid toutes les tentatives allemandes.

 

La défense du ravin de la Hayette, des ouvrages de Miramas et de Tarascon, de la pente ouest du Mort-Homme les combats 20 et 21 mai, coûtent plus de 650 hommes qui se sont sacrifiées pour le maintien du front sur ce secteur.  Alexandre CLERGUE sera de ceux.

 

 

 

   


 

Alexandre CLERGUE est tué à l’ennemi, lors du bombardement de la 1ère  ligne dans laquelle le 6ème bataillon était en poste,  le 10 mai 1916.

 

Les autorités militaires ne semblent pas connaître son lieu de sépulture. A-t-il été abandonné sur le terrain, a-t-il été enseveli dans le bombardement. Plus tard, s'il a été retrouvé, il n'a pu être identifié et anonyme placé dans une fosse commune, un ossuaire, peut-être dans le cimetière de guerre dans les environs du champ de bataille. Peut-être dans cet ossuaire de la Nécropole d'Esnes-en-Argonne,rassemblant 1500 corps non identifiés de la cote 304 et des environs.

 

 

Son acte de décès est dressé le 21/6/1916 à Jubécourt (Meuse). Il est retranscrit sur le registre d’état-civil de la commune de MALVES en Minervois (Aude) à la date du 12 septembre 1916

 

Son nom est gravé sur le Monument aux morts de Malves en Minervois

Titulaire de la croix de guerre avec étoile de bronze

« très bon soldat ayant toujours fait

vaillament son devoir »

 


 

JMO du 296ème RI en date du 10 mai et la liste des morts de la 22ème Compagnie :