François Prosper TISSEYRE 1884/1914

Fils de Cyriaque et de Félicité (ou Félicie) PISTRE, François est né le 6 février 1884 à Saint Hilaire de l’Aude, commune à mi-chemin entre Limoux et Carcassonne dans la région du Carcassès. 

Il fera son apprentissage de boucher, mais pour des raisons qui demeurent inconnues, c'est le métier des armes et l'exotisme des colonies qui l'attirent. Il va s'engager le 23 octobre 1902 pour le 4ème Régiment d'infanterie de marine, puis coloniale (R.I.C.) encaserné à Toulon. Il a un peu plus de 18 ans. 

Après ses classes, comme tous les jeunes gens de son âge, il passe son conseil de révision au mois de septembre 1904. A cette époque, ses parents vivent toujours à Saint Hilaire et lui-même y est domicilé.

 

Il est décrit comme petit (1m56), brun, yeux, bleus, front étroit, nez moyen. Lors de ce conseil de révision il est bien entendu jugé apte et son n° matricule au recrutement est le 1235/Narbonne.

 

A la suite de ce rite de passage, il est affecté au 16ème R.I.C, implanté en Cochinchine et au Tonkin, le 3 septembre 1905 et fait partie du corps expéditionnaire de Chine, jusqu'au 30 septembre 1907. Mais entre temps il repasse au 4ème R.I.C. le 30 avril 1907.

Sa période de 5 ans étant terminé, il se rengage le 23 mars 1908, il a alors 24 ans, pour le 1er R.I.C. (Cherbourg). Il participe alors à la campagne du Maroc à partir du 9 mai 1911, jusq'au 13 août 1914.

 

Au mois de juillet 1913, il a été affecté à un bataillon de marche colonial marocain. c'est avec cette unité qu'il rentre sur le contint pour participer au conflit mondial qui vient de commencer. Ce doit être un soldat passable, car aucune promotion ne semble lui avoir été octroyée malgré près de 12 années passées dans l'armée.

 
Ses parents étant certainement venus s'établir à Trèbes dans les années 1907/1908, il réside officiellement à Trèbes, lorsque la mobilisation est décrétée.

Est-il marié ? A-t-il des enfants ?

Le "turcos" de seconde classe François décèdera (disparu) le 29 septembre 1914 aux environs de la ferme des Marquises, sur la commune de Prunay (Marne), à l’est de Reims.

 

Le 16 août 1914, le 7ème bataillon colonial du Maroc, auquel est affecté François débarque à Cette (Sète) puis est dirigé vers Bordeaux. Avec le reste de la Division marocaine placée sous le commandement du général Humbert, il se rend aussitôt à la frontière belge. Le 18, il débarque dans la région de Tournes (Ardennes). Après avoir, sous les acclamations de la foule, traversés Mézières en fête, ils entrèrent en Belgique; d'autres compagnies n'eurent même pas le temps de passer la frontière car la retraite commençait déjà. La bataille  perdue de Charleroi a modifié les plans du commandement et le 7ème bataillon reçoit mission avec le reste de la Division de protéger la retraite en s'établissant sur la ligne Signy–l’Abbaye/La-Fosse-à-l'Eau. Pour le baptême du feu, tous étaient à leur poste. L'enthousiasme des soldats coloniaux n'a pas été entamé par ce revers en Belgique. Les hommes sont sûrs d'eux et dès le premier contact avec l’ennemi, ils révèlent de fortes qualités. Ce baptême, ce fut le 28 Août à la Fosse-à-l'Eau. L'ennemi débouchait de la forêt de Signy-l'Abbaye; ordre a été donné à la Division d'arrêter sa marche.

 

Alors zouaves et tirailleurs (en larges culottes blanches, ceinture bleue ou rouge, chéchia écarlate) chargèrent l'ennemi, comme ils avaient l'habitude de le faire au Maroc, loyalement, à découvert, les officiers en tête. Et si impétueux fut leur élan, que l'ennemi plia, ce qui deviendra le 1er R.I.C.M. bouscula sur 1.500 mètres de profondeur les troupes germaniques. La première rencontre fut une première victoire. Ils renouvelèrent, ils manœuvraient et attaquaient les colonnes qui progressaient, au lieu de les attendre de pied ferme. Le choc était à chaque fois très rude. Sabre à la main, chargeant héroïquement à la tête de leurs bataillons, plusieurs commandants étaient tombés.

 

L'artillerie avait pris une part active à la lutte; jusque sur la crête de la Fosse-à-l'Eau, ses batteries étaient venues se mettre en position, presque mêlées aux premières lignes d'infanterie. Lorsque dans la nuit, il est ordonné de battre retraite, comment le pourrait-il, étant presque cerné ? Pour donner le change, une section sort des tranchées pilonnées par les obus et, avec une abnégation incroyable, se rue sur les allemands. Pendant ce temps, avec calme, les autres se retirent, section par section, par l'étroit goulot encore praticable, passant aux derniers défenseurs qui vont mourir toutes les cartouches qui ne sont pas tirées. Quand la Division quitta la Fosse-à-l'Eau, l'ennemi n'osa pas la poursuivre et ce n'est que le lendemain, tard dans la matinée, que les Allemands lancèrent leurs colonnes d'assaut sur les ruines du village de Launoy. Le bataillon perdit ce jour-là 2/3 de son effectif.

 

Cependant, c'est encore à la Division Marocaine qu'est confiée, le 30 août, la mission de retarder l'envahisseur devant Rethel et de permettre, à l'armée de Langle de Cary, le tranquille passage de l'Aisne. Trois fois, coloniaux et tirailleurs attaquent Bertoncourt, trois fois ils pénètrent dans le village en flammes. Devant leur contenance héroïque, l'ennemi s'arrête, l'armée franchit l'Aisne et à son tour, la Division Marocaine traverse la rivière entre Seuil et Amagne.

 

Le 31 août 1914, le régiment organise la défense du Châtelet. Les troupes ennemies, malgré leurs avions et leurs patrouilles de « uhlans », viennent à nouveau se briser sur les barricades défendues avec une farouche résistance, comme une mer qui déferle sur les rochers. Sous un bombardement terrible, le Châtelet est en feu. Le flot envahisseur submerge ses défenseurs.  

 

Le 1er septembre nouveau combat, c'est Alincourt où les batteries, malgré leurs lourdes pertes, ne quittent leurs positions qu'à la dernière minute avec les arrière-gardes d'infanterie. Et la retraite continue. La craie blanche de Champagne remplace les bois sombres des Ardennes. En une matinée, la montagne de Reims est franchie entre Ludes et Tauxières et l'on recule toujours: Tours-sur-Marne, La Fère-Champenoise, Vertus. Malgré les étapes interminables, les nuits sans sommeil, les ravitaillements insuffisants, malgré la tristesse des longs convois d'émigrés qu'ils croisent sur les routes, fuyant l'envahisseur, malgré les villages en flammes qui tous les soirs illuminent la plaine, pas un instant le découragement ne les effleure. La journée du 4 septembre marque la fin de ce calvaire. La Division cantonne aux environs de Broussy-le-Grand.

 

Les 6ème, 7ème et 9ème bataillons coloniaux du Maroc, ayant perdu les 2/3 de leurs effectifs sont fusionnés dans ce qui devient le 1er régiment (et le 2ème) mixte d'infanterie coloniale, encore modifié le 24 septembre. (En décembre, il deviendra le 1er régiment de marche d'infanterie coloniale).  

 

Le 5 septembre, c'est l'ordre du général Joffre: «Au moment où s'engage la bataille d'où dépend le salut du Pays, il importe de rappeler à tous que le moment n'est plus de regarder en arrière. Tous les efforts doivent être employés à attaquer et à repousser l'ennemi. Une troupe qui ne peut plus avancer devra, coûte que coûte, garder le terrain conquis et se faire tuer surplace plutôt que de reculer. Dans les circonstances actuelles, aucune défaillance ne peut être tolérée.»

 

La Division marocaine en a l’habitude, elle qui, par 3 fois déjà au cours de la retraite, avait fait front à l'adversaire et par sa contenance héroïque et la rudesse de ses assauts, était parvenue à arrêter un instant sa marche.

Les 6, 7 et 8 septembre ce sont les combats de Coizard, d'Oye, de Reuves et les 3 assauts victorieux sur Saint-Prix, combats qui, avec celui de Mondément, resteront une page glorieuse malgré les lourdes pertes. Le 9, c'est, sous un bombardement effroyable, la résistance acharnée aux attaques allemandes sur Saint-Prix, puis Mondément, abandonné un instant sous la pression de l'adversaire. La Division Marocaine réoccupe le château et les bois. Il faut qu'elle y tienne à tout prix, la bataille va pivoter autour de cet axe. La fortune a voulu que la Division Marocaine fût là ! Puis ce sont les marais de Saint-Gond, et le 10, c'est l'ennemi s'enfuyant en désordre.

 

Ce courage fut salué par cet ordre du jour: IXème ARMEE DIVISION DU MAROC Bannes, le 10 Septembre 1914 - ORDRE N°40 : « Le Général Joffre... a félicité le Général Foch Commandant la IXème Armée, de la victoire remportée hier. Le Général Foch a bien voulu venir lui-même remercier le Général Humbert des efforts fournis par la Division du Maroc, à qui il attribue l'honneur et le succès de la journée. Il était, en effet, essentiel de tenir à outrance sur les positions autour de Mondément, car si l'ennemi les avait forcées, il aurait atteint le rebord de la Falaise de Champagne. De ces hauteurs, il aurait pu infliger à notre Armée un désastre. La fermeté des troupes de la Division du Maroc a donc été la condition de la Victoire... »                                                                                     (On voit, ci-dessus, Joffre remettre en personnes des décorations à plusieurs tirailleurs qui se sont signalés poar leurs exploits)

Cependant l'ennemi commence à s'enterrer; il se protège par d'épais réseaux de fil de fer contre lesquels est impuissant le plus sublime courage. Malgré des efforts répétés, la Division ne peut le déloger de la rive nord de la Vesle. Organisé autour de la Ferme des marquises, position perdue avant la bataille de la Marne, puis reprise le 13 septembre, le régiment est violemment contre-attaqué les 27, 28, 29 sans que les allemands ne puissent reprendre ce lieu. François TISSEYRE décèdera le 29 septembre 1914 au nord de la << ferme des Marquises, sur la commune de Prunay (Marne)(aujourd’hui sur la commune Val de Vesle), à l’est de Reims, tué (disparu) à l’ennemi.

 

Le RICM est exsangue, épuisé par l'héroïque effort soutenu pendant un mois; il va falloir le réorganiser. C'est la fin de la première phase de la » glorieuse histoire » de la Division Marocaine.

Au cours de la grande guerre le RICM aura perdu 15 000 marsouins (tués ou blessés) dont 257 officiers. Son drapeau ne portera pas moins de 10 palmes sur la croix de guerre 14-18, la Légion d'honneur (pour un fait similaire à la prise d'un emblème de haute lutte à l'ennemi qui sera la conquête du fort de Douaumont le 24 octobre 1916), la médaille militaire (le 5 juillet 1919), l'Ordre de la Tour et de l'Épée.


François est tué à l’ennemi (probablement disparu) le 29 septembre 1914, au nord de la ferme des Marquises, sur la Commune de Prunay (Marne), il a 30 ans.

 

Aucune sépulture n’est connue

 

Son décès est porté dans le registre d’Etat-civil de la commune de Trèbes, le 20 mars 1921, par suite d’un jugement du tribunal de Carcassonne officialisant son décès en date du 3 mars 1921.

 

Son nom est gravé sur le Monument aux morts de Trèbes.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

                                               Extrait du Journal des marches et opérations en date de septembre 1914   V

Transcription du jugement du Tribunal de Carcassonne