Gustave Henri JAUZE (1891/1914)

Gustave Henri JAUZE, est né à Trèbes le 2 octobre 1891, fils de Baptiste et d’Augustine BOY tous deux ariégeois. Baptiste est venu s’installer à Trèbes comme employé de la Compagnie des chemins de fer du midi. Ils résident le quartier de la Gare. 

 

Gustave passe son conseil de révision vers septembre 1911 à Foix, tout en demeurant à Toulouse où il se déclare comme employé des chemins de fer. Il est déclaré bon pour le service et affecté au 83ème régiment d’infanterie le 1er octobre 1912, où il commence son service  militaire. Gustave est affecté à la 2ème compagnie - 1er bataillon). L’Etat-major, le 1er (celui de Gustave) et le 3ème bataillons se trouvent à Toulouse, le second bataillon à Saint-Gaudens.

 

A la déclaration de guerre Gustave Henri ne change pas de régiment.

 

Le transport par voie ferrée débarque les hommes à Valmy, le 1er bataillon (celui de Gustave) et l’E.M. cantonne à Somme-Tourbe, le 2ème bataillon à Wargemoulin, le 3ème à Saint-Jean/Tourbe. Le dernier débarquement a lieu le 9 août, à quelques lieux seulement d'où Gustave périra dans 36 jours, après avoir parcouru au moins 300 km à pied.


Après plusieurs jours de marche d'approche ayant parcouru plus de 130 km, ayant passé la Meuse à Pouilly, c'est du côté de Bertrix, au nord des confins de la Belgique et de la France, que le 83ème Régiment d'Infanterie qui appartient à la 34ème division (17ème corps d'armée) prend pour la première fois le contact de l'ennemi. 

 

Après une halte à Carignan, le 19 août, le régiment, venu par étapes de la vallée de la Tourbe, se concentre le 21, en position d'attente dans la forêt de Pure. La région est très accidentée, boisée et coupée par une entaille profonde où, entre deux rives hautes et tombant à pic, la Semoy coule sur un lit étroit. Pendant la journée du 22, comme il poursuivait sa marche dans la direction d'Herbeumont, il reçut, vers 16 h, l'ordre d'attaquer les Allemands qui, du côté de Jéhonville et d'Aulnoye, occupaient à la lisière d'un bois des tranchées protégées par des fils de fer et dominant une clairière marécageuse, large d'au moins 800 mètres. Profitant des couverts au-dessus desquels les canons de 77 ennemis fusent déjà en grand nombre, le régiment se déploie en tirailleurs et se tient prêt à donner l'assaut. Au signal convenu, il s'élance au pas de charge, entonnant l'une après l'autre la Marseillaise et la Toulousaine. 

 


 

Après avoir repassé la Meuse à Rouffy - Autrecourt, il livre, le 26 août, le combat de Thélonne et le 27, celui de Noyers. Ce ne sont pas là de simples escarmouches, mais de sérieuses batailles. Les Allemands n'avancent qu'en jetant régiments sur régiments dans la mêlée. Le village de Noyers perdu 3 fois, est repris 3 fois par les 2ème et 3ème bataillons. Il n'est abandonné que plus tard dans la nuit, quand chacun a fait pour le conserver plus qu'on pouvait demander. 

 

Le 28 août à Bulson, la 12ème compagnie prend d'assaut une forte position occupée par les ennemis sur les abords d'un plateau. 

 

Par l'Argonne, par l'Aisne qu'il traverse à Attigny, par le camp de Châlons, le 83ème gagne la région de Mailly. Il arrive ainsi le 5 septembre à Trouans-le-Grand et à Trouans-le-Petit, il en repartira le 7, après s'y être reformé afin d'aller prendre sa place parmi les troupes de la bataille de la Marne.

 

Mais les mitrailleuses ennemies, se dévoilant soudain, ouvrent le feu et couchent nos lignes à mesure qu'elles émergent hors des taillis et se dressent sur la clairière nue. A plusieurs reprises, les officiers entraînent les hommes à l'assaut, mais sans succès et les ramènent, moins nombreux chaque fois. Les pertes sont lourdes, le régiment fond. Cependant, par 5 fois, il tente d'aborder les tranchées allemandes, méprisant le feu intense de l'ennemi sans cesse croissant, désireux avant tout d'arriver à ce corps à corps, à cette lutte à l'arme blanche qui seule entre combattants loyaux décide de la Victoire.

 

Mais le soir vient et la résistance se fait plus opiniâtre, plus meurtrière. Les trois bataillons, réduits et affaiblis par les assauts qu'ils ont donnés, ont ordre de se replier. Le peu qui reste du régiment est ramené à l'arrière pendant la nuit. La journée du 22 août 1914 l'a décimé. Tel qu'il est, et jusqu'au 5 septembre, le 83ème, sans prendre aucun repos, franchissant des rivières, traversant des forêts, bivouaquant le soir n'importe où, souvent repartant sans avoir mangé, sans avoir dormi, retarda la ruée des Allemands sur la France. Il marchera presque toujours à l'arrière-garde de l'Armée. S'accrochant au terrain, défendant le sol, pied à pied et infligeant à l'occasion quelques corrections à l'ennemi. 

 

Cependant, l'ennemi menace d'investir Paris. Un mot d'ordre est donné par le Généralissime : «Les troupes doivent se faire tuer sur place plutôt que de reculer». Le 83ème s'y conformera strictement. Le 8 septembre, le 17ème corps d'armée doit s'emparer de Sompuis. Le 83ème régiment d'Infanterie fait partie d'un détachement opérant à la gauche de ce corps. Sa mission est de déborder le village par le sud-ouest. Un peu après minuit, le mouvement débordant est en voie d'exécution quand arrive une estafette du 21ème corps d'armée assignant au détachement comme nouvelle mission de tenir les hauteurs en arrière par où une partie du 12ème corps d'armée et le 7ème corps d'armée tout entier doivent entrer en action. L'intervention de ces éléments est escomptée pour 10 h. A cheval sur une route et déployé au pied d'une croupe, une partie du régiment s'efface à la lisière d'un bois subitement occupé par les Allemands. Les mitrailleuses ennemies ouvrent le feu et les 77 tombent dru sur nos lignes. Pas d'abris, aucun couvert. Nos positions sont dans une cuvette où les obus fument, où les balles sifflent. Les pertes sont lourdes, blottis dans des trous hâtivement creusés les tirailleurs du 83ème ripostent par un feu nourri dirigé sur le bois. Les munitions s'épuisent et de l'arrière, malgré les demandes fréquentes, il n'en vient point. Sur la gauche, sur la droite, par les cornes du bois l'ennemi s'infiltre profitant des espaces laissés vides faute de combattants. Le péril est grand; toutes les cartouches sont maintenant brûlées. A 10 h, les avant-gardes du 7ème et du 12ème corps  d'armée apparaissent en arrière sur les crêtes. La mission du régiment est terminée. Alors ramassant ses blessés et couvrant sa retraite par la menace de ses baïonnettes, le 83ème s'évade de l'étreinte de l'ennemi, gravit les pentes, arrive à temps au sommet pour voir à ses pieds l'adversaire décimé par le feu de notre artillerie enfin déclenché. 


 Placé le soir en réserve à la Ferme de Lépine, le 83ème repart le lendemain. Une surprise l'attend. Ébranlé par la résistance qu'il a rencontré la veille dans la matinée et refoulé plus tard par les éléments du 7ème et du 12ème corps d'armée, l'ennemi s'est enfui cédant ici, comme partout ailleurs alors, à la vigoureuse poussée de nos armes. Fatigué, diminué par les combats livrés dans la journée du 8, le 83ème prend néanmoins part à la poursuite. Il fouille les rives de la Marne qu'il passe, à Omey, traverse la Moivre et arrive enfin, le 13 septembre, à Somme-Suippe, au nord de la Noblette après avoir cueilli les patrouilles que les Allemands ont laissé derrière eux, les isolés qui se cachent au fond des caves ou dans les meules de blé, vu des lignes de tranchées portant la trace d'une occupation récente, secouru des blessés abandonnés par l'ennemi sur une route jonchée de cadavres d'hommes, d'animaux, encombrée de sacs, d'armes, de véhicules brisés. Il a couvert ainsi de longues et rudes étapes à travers un pays difficile, par une chaleur torride, allant de l'avant sans arrêts et n'ayant sur l'ennemi d'autres renseignements que ceux qu'il se procure lui-même par ses reconnaissances hardies. 

 

 

Le 14 au matin, il se dirige vers Perthes-lès-Hurlus. Il marche en tête de la brigade sur la route qui mène de Suippes à Perthes, rencontre de fausses tranchées creusées par les Allemands et garnies de casques à pointes fixés au bout de pieux, traverse près de 3 km d'une forêt coupée, au milieu par une chaussée romaine et accède sur un plateau ras à gauche entre la route et la lisière du bois, le sol s'ouvre laissant voir les excavations béantes; en face, se dresse la cote 200 vers Souain, le clocher de Perthes au centre, et le moulin de Perthes dans la direction de Hurlus; à droite, se figent les molles ondulations des collines crayeuses où naissent de rares bouquets de sapins. Trois compagnies du 1er bataillon, dont la 2ème compagnie (celle de Gustave) marchent en tête, à cheval sur la route de Perthes. Tandis que prudente, elles s'avancent sur le plateau, dans une prairie, elle constate que les ennemis sont tout près. Elles se déploient pour couvrir le bataillon qui la suit, mais déjà, les mitrailleuses Maxim crépitent, ouvrant le feu à une distance d'environ 150 mètres. Le lieutenant Laffougère (3ème Cie) tombe, blessé au bras pendant qu'il donne des ordres. Le gros du régiment arrive et le combat s'engage. Les Allemands sont partout, dans les bois, sur les crêtes et dans les villages. Ils ont eu le temps de préparer et de choisir leur position. Les pertes sont lourdes et le 83ème est à bout de souffle. Malgré cela, durant trois jours, il ne se passera pas d'heure sans qu'il ne cherche à presser son adversaire. Pour réussir, il ne recule devant aucun moyen ; ayant demandé le concours de l'artillerie, il aide les canonniers à mener à bras une pièce de 75 au bout de ses lignes espérant qu'ainsi il parviendra mieux à faire réduire au silence les mitrailleuses qui le gênent. 


 

Gustave Henri JAUZE disparait dès le 1er jour de ce combat, à l'avant-garde de son régiment, le 14 septembre 1914.

 

Son corps ne sera jamais retrouvé, ou s'il a été retrouvé, il n'a pu être identifié. Peut-être se trouve-t-il dans l'un des ossuaires de la Nécropole nationale " La Crouée" située sur la commune de Souain (Marne), à proximité du champ de bataille.

 

Le cimetière de « la Crouée » est le troisième plus grand cimetière militaire 14-18 de France. Plus de 30 734 corps français y reposent dont 9050 seulement ont pu être identifiés et enterrés en tombes individuelles. Les 21 684 soldats inconnus sont regroupés dans 8 ossuaires. Créé en 1919 et aménagé jusqu’en 1924, ce cimetière regroupe les corps exhumés de centaines de petits cimetières, tombes et fosses communes des secteurs de Souain, Tahure, Perthes les Hurlus, Beauséjour, le Mesnil-lès-Hurlus, Hurlus, St Hilaire le Grand, St Souplet, Ste Marie à Py, Manre, et Suippes.

 

C'est un jugement du Tribunal de Pamiers (Ariège) qui le déclarera mort le 9 décembre 1920. Son décès est transcrit sur le registre d'état-civil de la commune de Pamiers, le 9 janvier 1921.

 

Son nom est gravé sur le Monument aux Morts de Pamiers (Ariège).

 

Le nom de Gustave apparait dans les avis de recherche des disparus de l'Express du Midi

en date du 30 décembre 1914 et du 7  juin 1916

Nécropole Nationale "La Crouée"                         Ossuaire