marsouin, caporal, en août 1914
marsouin en 1915
Firmin Joseph MARCHAND, fils de François (Patrice dans son acte de mariage) et d’Adeline TRICOIRE, est né le 24 février 1886 à Escales (11126).
Escales est une commune de l’Aude, au nord-ouest de Lézignan-Corbières, de taille modeste : un peu plus de 10km2 elle compte à la naissance de Firmin 650 habitants.
Lors du conseil de révision de sa classe, vers septembre 1906, qu’il passe probablement à Lézignan-Corbières, son n° matricule au recrutement est le 359 / Narbonne. Il déclare résider à Espunia (Espagne), alors que ses parents résident toujours à Escales. Il exerce la profession de cultivateur.
Bon pour le service armé, il effectue son service militaire à partir du 10 octobre 1907, jusqu’au 25 septembre 1909, au 4ème Régiment de Zouaves, cantonné à Tunis. Il fait la campagne de Tunisie aux mêmes dates, il est nommé caporal en octobre 1908.
A son retour, il réside à Rustiques en 1910.
Il a l’occasion de rencontrer une trébéenne Jeanne Augustine, dite Augusta, ROUQUET, née en 1890, fille d’un bourrelier, petite-fille d’un sabotier. Ils se marient à Trèbes le 25 janvier 1911. Dans son acte de mariage, il déclare être régisseur. Ils auront un enfant : Joseph François Paul qui naîtra le 30 mars 1915, et qui sera adopté par la Nation le 23 octobre 1918.
Firmin MARCHAND décède le 26 octobre 1916 à l’âge de 30 ans à Brod (Serbie)
A la mobilisation en août 1914, il est affecté, dès le 4 août, au 24ème Régiment d’infanterie coloniale (RIC). Le 24ème est caserné à Perpignan. Les réservistes rejoignent leur dépôt le 3 et le 4 août; certains partent immédiatement avec le 24ème RIC. « Nombreux sont les mécontents désireux d’aller au plus vite combattre notre implacable ennemi » dira l’Historique du régiment. Les autres formeront le 44ème RIC, créé de toutes pièces avec une partie des cadres de l’active, qui quitte Perpignan pour un court séjour de formation à Cavaillon (Vaucluse). Le 44ème appartient à la 150ème D.I. jusqu’à septembre 1915, à la 11ème DIC de nov. 16 à nov. 18
Le 20ème jour, il s’en va, vers Dugny/Meuse, puis Dieue/ Meuse, son premier cantonnement. Cette date marque la fin de la concentration. La situation est critique; les allemands progressent sur tout le front et, sous la pression constante, les armées françaises battent en retraite. Le 23 août, le 44ème RIC reçoit le baptême du feu, copieusement arrosé par l’artillerie ennemie pendant une marche d’approche difficile, il attaque Darmont le 24 août. Les 1ère et 2ème Cies réussissent, malgré les mitrailleuses, à prendre pied dans le village. Soumises au tir intense d’artillerie, à la merci des tireurs cachés dans les maisons, elles conservent le gain. Appuyées par la 6ème Cie, elles repartent à l’assaut, mais les pertes sont lourdes. Le succès est partiel. Malgré les réactions de l’ennemi, la nouvelle ligne est inviolée et mais l’ordre de se replier stoppe l‘action.
Le 1er novembre, le 44ème commence l’aménagement du secteur de la ferme Buzémont et les 8 et 9, il fait plusieurs tentatives sur Boureuilles. L’artillerie et les mitrailleuses font des ravages; malgré les pertes élevées, l’assaut est tenté à plusieurs reprises et tous font preuve de courage, tel un sous-lieutenant qui, «blessé d’une balle au visage, n’a pas voulu quitter son commandement et a été tué en entraînant ses hommes en avant». Le terrain est gagné pied à pied, l’avance pleine de difficultés, les intempéries, la boue, n’atteignent pas trop le moral du régiment qui continue les travaux de secteur.
Le 20 décembre, il essaie à nouveau d’enlever les tranchées Nord de Boureuilles et de la route Boureuilles-Vauquois. La 5ème Cie débouche à l’est de la ferme Buzémont: elle avance, malgré le feu intensif de l’ennemi.
A 300 m du départ, toute progression est impossible; les survivants se couchent dans leurs trous. La 7ème Cie, après une avance minime, subit le sort de sa voisine. Le lendemain, la 8ème Cie force le succès: brillamment enlevée, elle prend pied dans le village et, dans des conditions critiques, s’abrite de son mieux et conserve le terrain conquis.
Le 17 février 1915, il essaie d’élargir ce gain entre Boureuilles et Vauquois. Malgré les efforts vers la scierie et le Pont-de-l’Aire, l’objectif n’est pas atteint; les pertes sont sensibles. Au centre, une autre compagnie éprouve les mêmes difficultés; sortie des brèches aménagées dans nos réseaux, elle est arrêtée dans son élan par les barbelés, peu abîmés par la préparation. Les survivants se terrent sous le feu des mitrailleuses et restent jusqu’au soir à quelques mètres des tranchées adverses en butte au tir des tirailleurs. Ils font de vaines tentatives, et dans la nuit, tous se replient dans les tranchées. Ces fréquentes opérations inquiètent les allemands dont les tirs désormais déclenchés sans motif prouvent l’énervement, la vigilance redouble. Les mauvaises conditions atmosphériques rendent la surveillance pénible.
Il est ensuite dirigé à Fey-en-Haye et au Bois-le-Prêtre, il subit la grande vogue des engins de tranchées, les périodes d’agitation et les fréquents coups de main. Le 27 septembre 1915, il prend position en N.-O. de Perthes, dans un secteur complètement bouleversé par des préparations d’artillerie et arraché à l’ennemi. Les hommes sont à découvert. Il reçoit l’ordre de tenir coûte que coûte, malgré le tir de l’artillerie, le feu violent de mousqueterie et les rafales de mitrailleuses. Le 44ème remplit sa mission sans défaillance.
Le 6 octobre, il est chargé d’une opération délicate: l’enlèvement d’un saillant ennemi. Les 23ème et 14ème Cies sautent le parapet et malgré les nombreux vides dans la vague, atteignent les barbelés. Le réseau est intact et les mitrailleurs ennemis s’acharnent sur ces objectifs faciles; les 22ème et 19ème Cies ne sont pas plus aidées et regagnent de nuit les points de départ.
Il prend ensuite, en novembre, le secteur de Massiges. Dur calvaire pour le 44ème, 60 jours de travail sans répit. Il aménage le secteur dès son arrivée, et, dans un sol bouleversé par les attaques de septembre, il crée de toutes pièces une organisation forte : tranchées solides, protégées par de larges réseaux, boyaux profonds, abris confortables. Oeuvre éphémère ! La pluie d’abord, le dégel ensuite réduisent à néant le fruit de ces longues journées de labeur. L’eau s’infiltre, les parapets s’effritent, puis de gros blocs se détachent, et par endroits, parapets et parados, insensiblement attirés l’un vers l’autre, se rejoignent et comblent la tranchée. La nuit, les travailleurs rétablissent le passage, consolident les parois, le secteur reprend tournure mais le dégel a tôt fait de lui donner à nouveau un aspect lamentable. C’est un vaste cloaque où la sentinelle patauge pour surveiller l’ennemi très nerveux, où les hommes s’enlisent pour porter le ravitaillement. Malgré cette perspective de démolition rapide, le régiment recommence sans cesse les travaux voués à la destruction. Il surmonte les difficultés et donne une preuve de ténacité et d’entrain.
Après quelques reculs dans la région, le 44ème est engagé dans le bois de Minonville. Une compagnie est chargée de la surveillance de la lisière. La progression dans le bois fourré la retarde. Toutefois une section avance plus rapidement et se trouve seule face à l’ennemi qu’elle met en fuite. Les allemands, se reprenant, tente, en vain de l’envelopper, mais la compagnie finalement se fraye un passage à la baïonnette et regagne Souilly et malgré le tir d’artillerie, le régiment peut rejoindre Heippes. Son organisation défen-sive est activement poussée; les tranchées sont ébauchées, des barrages construits. Le 1er bataillon occupe le village et le 2ème prend position à la côte 324. Le 8 septembre, vers 22h, l’ennemi attaque. Il progresse rapidement et s’empare de la crête ouest de Heippes. Les compagnies du village, prises en enfilade, se replient. A 2h45, le bois Chardin, le Signal, sont tombés. La côte 324 est intenable et ses occupants retraitent vers Souilly. Le 1er bataillon en position derrière Heippes les imite. Le régiment est relevé après ce gros effort. L’avance touche à sa fin et le 13 septembre, les allemands reculent vers le Nord. La poursuite s’organise. Le 44ème y prend part sans intervenir et s’arrête à Dieue. Furieux de son échec, l’ennemi contre-attaque. Le 20 septembre, le régiment lui donne la réplique à Vieiville et Billy où il se défend farouchement. Son artillerie (une seule batterie de montagne) est soumise, dès le début, à un tir de démolition; 2 pièces sont mises hors d’usage, les servants sont très éprouvés. Il résiste, maintient ses positions, mais le repli des voisins l’oblige à abandonner ses tranchés jusqu’à là intégralement conservées. Le 24 septembre, il montre de nouveau ses qualités au bois de la Selouze où il est attaqué par surprise. Le choc est rude. La 5ème Cie tient d’abord tête puis, sous la poussée, recule. Mais elle contre-attaque immédiatement, repousse les assaillants à la baïonnette mais, en dépit de tous ses efforts, elle peut gagner la lisière, elle se terre, s’accroche au terrain, pendant la ruée des 8ème et 6ème Cies qui arrêtent net l’avance adverse. Le 1er bataillon envoyé en renfort ne peut les atteindre; la traversée obligée d’un glacis lui cause de lourdes pertes et il est mis hors de combat par les mitrailleuses. L’organisation du terrain entraîne la période ingrate de secteur avec ses travaux, ses corvées, ses bombardements fréquents, ses pertes quotidiennes.
Seul le 2ème bataillon prend part à une action offensive. Il attaque sans succès la passerelle de Saint-Mihiel et les casernes de Chauvoncourt, fortins inexpugnables. Il leur donne l’assaut avec le bel esprit de sacrifice, mais ne peut réussir. Quelques jours d’agitation suivent cette opération: les tirs de démolition se succèdent, l’arrière est abondamment arrosé, puis le calme renaît. Le 44ème reprend la vie de secteur, émaillée de reconnaissances, d’escarmouches, jusqu’à son départ pour l’Argonne.
Le régiment quitte ces parages de Boureuilles et se rend à Fontaine-Madame. Le 30 juin, le Kronprinz attaque en Argonne avec ses meilleures troupes «strosstruppen» qui sont chargées de diversions sur certains points du front. Fontaine-Madame est du nombre. Depuis quelques jours, l’ennemi s’acharne, tranchées et boyaux sont quotidiennement soumis à des bombardements intenses. Les batteries sont soigneusement repérées, toute élévation de terrain, tout ouvrage nouveau, les postes de commandements, les noeuds de communication sont pris à partie. Après une préparation d’artillerie avec de gaz suffocants et lacrymogènes, l’attaque est déclenchée. La position est funeste au régiment, retranché dans un fond de ravin; la nappe gazeuse y stationne, et ses pertes sont lourdes. Malgré le nombre élevé d’intoxiqués et le pilonnage, le 44ème résiste à la première tentative. L’ennemi veut réussir, le bombardement redouble d’intensité, et isole la première ligne. De nombreux blessés et quelques valides restent entre ses mains; rares sont ceux qui regagnent la 2ème ligne. Une énergique contre-attaque est lancée à la conquête du terrain perdu. Un barrage d’artillerie et un feu de mitrailleuses sont déclenchés à la sortie des vagues. Elles continuent leur progression mais ne peuvent atteindre l’ancienne ligne. Le bombardement incessant oblige les occupants de Bagatelle et de Blanloeil à abandonner leurs positions. Ce repli est une menace d’enveloppement pour le régiment: elle devient plus sérieuse sous la pression continuelle et l’encerclement serait complet sans le sang froid d’un capitaine. Avec une poignée d’hommes et quelques mitrailleurs, il organise un élément de boyau et se défend énergiquement. Après une lutte acharnée, mitrailleuses et grenades ont raison des vagues adverses. L’ennemi a échoué, bousculé par un peloton, il cède et le régiment s’empare des points importants pour la défense. Quelques fluctuations se produisent, mais il les conserve malgré les tentatives des Allemands. A la suite, Firmin est nommé sergent le 5 juillet, et cité à l’ordre du régiment le 6 juillet 1915. (JMO disparu ?)
Il quitte la Champagne pour la Somme où il occupe le secteur de Rosières. Le 21 février 1916, il est attaqué avec émission de gaz, la nappe envahit les tranchées, gagne les abris et l’ennemi, sûr de la mise hors de combat des occupants, se rue sur les tranchées. Une énergique contre-attaque d’une section de la 24ème Cie les rejette et fait complètement échouer leurs efforts. Après cet échec, ce dernier se montre peu actif. Il tente le 6 mai un coup de main sur le saillant de la Maisonnette (voie ferrée Rosières-Nesle) Un bombardement intense précède le déclenchement. Tranchées et boyaux sont nivelés, les défenseurs tués ou blessés. Au sud, l’avance ennemie est enrayée par les mitrailleuses, au nord, les allemands favorisés par la fumée des obus, pénètrent dans les tranchées, enlèvent nos blessés et regagnent leurs lignes.
Le régiment recommence l’organisation du secteur qu’il ne quittera que le 29 mai pour aller se préparer à la bataille de la Somme. Le 20 juin, le 44ème prend position au bois de la Vierge (sud de Frise). Pour achever l’aménagement du champ de bataille, il fait exécuter les premiers tirs de destruction. Le 26 juin, relevé, il devient réserve du 1er CAC. Le 8 juillet, le 5ème bataillon participe avec le 37ème colonial à l’attaque le château de la Maisonnette, face à Péronne. Les allemands défendent énergiquement cette position qui est enfin enlevée le 9 au soir, et occupée dans la nuit du 9 au 10 par la 18ème Cie du 44ème RIC. Le lendemain, les allemands tentent de la reprendre et lancent 5 attaques successives. L’ennemi veut atteindre son but et n’hésite pas à utiliser des moyens déloyaux pour forcer le succès, il fait le simulacre de se rendre et fusille à bout portant une section. La 18ème Cie défend le terrain pied à pied, refoule l’ennemi à la baïonnette, mais elle est obligée de céder. Elle mérite par sa conduite la citation à l’ordre de l’armée: «Chargée le 18 juillet 1916 de la défense de l’important point d’appui enlevé à l’ennemi, a rempli sa mission…, avec une vigueur, une ténacité et un esprit de sacrifice remarquable, repoussant à la baïonnette les contre-attaques d’un adversaire très supérieur en nombre»
L’ordre de reprendre la Maisonnette est donné: les survivants de la 18ème Cie et 3 sections de renfort de la 19ème Cie s’élancent. Ils progressent malgré le bombardement et la fusillade, en dépit de l’occupation du bois Blaise et atteignent la lisière est de la Maisonnette. Les allemands réagissent. Le 44ème résiste, mais sous la menace d’enveloppement par le nord et par le sud, il ne peut s’y maintenir et regagne ses tranchées. Cette opération clôture la liste de ses combats sur le front français.
Le 29 août le 44ème RIC cantonne (3 bataillons: le 5ème, 6ème et le 20ème bataillon de Tirailleurs sénégalais ) à Chevières et Riocourt. Avec ordre de se tenir prêt pour partir en chemin de fer pour Marseille. Le 7 sept. L'EM et le 6ème bat. du 44ème RIC embarquent à Chevières. Les autres éléments constituant le régiment restant cantonnés. Le 9 sept. ils arrivent à St Louis les Aygalades à proximité de Marseille. Le 10 sept. L'EM et le 6ème bat embarquent sur le vapeur Britannia à destination de Salonique. Après une traversée sans incident, ils débarquent le 16 à Salonique. Le 44ème stationne au camp de Zeitenlick en attendant le reste du régiment.
Il le quitte le 29 septembre, au complet et après des marches longues et pénibles, de nombreuses nuits au bivouac, il arrive à Sakuvelo. Le 13 octobre, il est en ligne entre Medzidli et Kenali où des parallèles de départ ont été ébauchées. En dépit de la fatigue, tous travaillent avec ardeur sous les rafales des mitrailleuses fréquentes et nourries ; les pertes sont sensibles. Le 14 octobre, à 11h57, l’attaque est déclenchée: les tranchées allemandes sont assez éloignées et le 44ème, d’un seul élan, franchit les 300 m. Malgré les barrages d’artillerie et de mitrailleuses, il atteint le réseau ennemi qu’il trouve intact. Il essaie alors de regagner ses tranchés mais essuie de lourdes pertes sur un terrain découvert.
Le général SICRE, de la 21ème BIC félicite la conduite du régiment dans cet ordre général : « le 14 octobre 1916,… le 44ème RIC se sont portés crânement, à l’assaut des positions ennemies fortement organisées, à l’est de Medzidli. Sous un feu nourri de mousqueterie, de mitrailleuses, et sous de violents tirs de barrage, le 44° RIC fit preuve du plus beau mépris du danger. »
Les nombreux actes de courage et d’énergie accomplis au cours de ce rude assaut témoignent de la haute valeur du 44ème RIC.
La part du 44ème est tout aussi glorieuse dans les opérations de la Cerna. Après une longue préparation d’artillerie, le 6ème bataillon avance sans éprouver de résistance, traverse Gravillens, dépasse la Maison Blanche et s’installe sur la crête qui domine Bukri. La position est capitale: il tient sous le feu le pont de ce village, permet à l’aile gauche d’avancer, mais tout essai de la droite (Serbes) est inutile. Le régiment se fait remarquer dans l’organisation du terrain conquis, harcèle sans cesse l’ennemi, prend part à des opérations de détail et dans ces tentatives, fait des gains appréciables. Sa tenue lui vaut encore les félicitations du général, commandant la brigade.
Toutefois Firmin Joseph MARCHAND, après tant périls, périra dans cette action.
Le Britannia
Firmin Joseph MARCHAND est tué à l’ennemi à proximité de Brod (en Serbie, dans les boucles de la Cerna, à proximité de la frontière grecque), le 26 octobre 1916. Il a plus de 30 ans.
Aucune sépulture n’est connue
Son décès est porté dans le registre d’Etat-civil de la commune d’Escales en date du 28 mai 1917 .
Son fils Joseph François Paul qui était né en mars 1915 sera adopté par la Nation le 23 octobre 1918.
Son nom est gravé sur le Monument aux morts de Trèbes, de Rustiques et d’Escales (ci-dessous).