Pierre Jacques DURAND 1877/1915

tenue de caserne pour les commis des services auxiliaires

 

tenue de combat des fantassins, durant le deuxième semestre 1915

Pierre Jacques DURAND, fils de Jean et de Cécile MARTY parfois dite Marie, est né le 14 janvier 1877 à Trèbes (Aude), dans le hameau de Saint-Julia. Ses parents, très mobiles depuis leur mariage, s’y sont installés depuis quelques années.

 

A l’époque de son conseil de révision en 1897 qu’il passe à Ginestas, il déclare exercer le métier de cultivateur, et résider avec ses parents dans la commune de Saint Marcel/Aude (Aude). Son numéro matricule est le 862/Narbonne.

 

Il est ajourné en 1898 et 1899 pour défaut de taille (1,52 m) et est finalement affecté aux services auxiliaires de l’armée en 1900.

 

Est-il marié ? Si oui avec qui ?

 

Il a quelques démêles avec la justice en 1910 pour ivresse, outrages et rébellion. Ce qui lui vaut 15 jours de prison.

 

Convoqué devant la commission de réforme de Narbonne le 30 novembre 1914, il est affecté au «service armé» le même jour. Il est mobilisé et rejoint le 125ème Régiment territorial d’infanterie, à Perpignan, le 30 décembre 1914. Il va alors avoir 38 ans. Il y exercera des activités auxiliaires et des exercices de formation jusqu’à la fin juin 1915.

 

Il décèdera le 11 octobre 1915, lors de l’attaque du bois de la Brosse à dents sur la commune de Tahure (Marne), moins de 4 mois après son arrivée au front.    


Il est affecté le 28 juin 1915 comme soldat de 2ème classe à la 23ème compagnie (6ème bataillon) du 228ème régiment d’infanterie (réserve du 28ème RI) dont le dépôt se trouve à Evreux. Il appartient à la 106ème brigade (53ème division) du 4ème groupe de réserve. Il est composé de 2 bataillons.

 

Le 228ème RI a participé à la bataille des frontières en août 1914 au nord-ouest de Maubeuge (bataille de Charleroi) puis à la retraite. Le 27 août, il est à Guise et participe la bataille de Guise les 28 et 29 août qui arrête un temps les armées allemandes. Il recule encore et le 4 septembre il est à Montmirail puis recule encore. Il participe à la bataille de la Marne (du 5 au 13 sept.) à partir du secteur de Villiers-St Georges, il avance plein est sur Montceaux-lès-Provins, Le Vézier, Pargny-les-Dhuys, Bailly. Le 13 septembre, il est à Berry-au-Bac après 120 km de progression. Il participe aux combats de la ferme du Choléra, puis de La Neuville le 17 septembre, ce qui lui vaut d’être cité à l’ordre du jour de la Vème Arméee. A cette date le front se stabilise et la guerre des tranchées commence. Là, en plus de la pluie, les bombardements sont incessants.

 

Le 25 septembre, le régiment est ramené à l’arrière.

 

Le 5 octobre, le 228ème est dirigé sur la Somme, dans le secteur de Bray/Somme, La Neuville-lès-Bray, Maricourt, Montauban de Picardie où il serra en lignes jusqu’en avril 15.

Le 20 octobre, le 228ème reçoit l'ordre de relever le 43ème RIC dans les tranchées de Maricourt. C'est le premier secteur que prend le régiment; il y demeure pendant 4 mois, se  perfectionnant constamment dans cette guerre de tranchée à laquelle cependant les hommes sauront s'adapter, supportant avec courage cette existence dans l'eau et la boue, chacun comprenant que la victoire sera à celui qui tiendra le plus longtemps.    

Le 17 mai, le Colonel commandant le régiment est blessé et évacué. Les opérations se continuent pendant plusieurs jours contre l'ennemi considérablement renforcé et opposant une très vigoureuse résistance. Le 29 mai, le 228ème RI est remis à la disposition de la 53ème division, et, après avoir pris quelque repos à l'arrière des lignes, à Habarcq, il reçoit l'ordre de relever le régiment qui poursuit l'action offensive dans le secteur du Labyrinthe à l'Est de Neuville-Saint-Vaast; secteur bien dénommé où l'ennemi, pendant un an, a accumulé les organisations défensives les plus enchevêtrées, et où les multiples boyaux s'entrecoupent dans tous les sens.

 

Bouleversées de fond en comble par les obus de gros calibres au cours de la bataille de la veille, les tranchées ont été converties en monticules informes de terre crayeuse, et çà et là apparais-sent quelques membres de malheureux enfouis sous les éboulements; des arbres calcinés dressent leurs lugubres moignons au- -dessus de ce terrain chaotique.    

 

De nuit et de jour, l'organisation du front est poussée avec activité, depuis les innombrables réseaux de fils de fer, les postes d'écoute et les galeries de mines jusqu'aux lignes de défenses nécessaires s'étageant dans la profondeur du Secteur. Toute cette zone donne l'aspect d'un formidable nid de fourmis. Pas un jour ne se passe sans qu'une amélioration ne soit apportée soit aux installations souterraines des hommes, soit aux travaux défensifs; une extraordinaire variété d'engins nouveaux est mise à la disposition des combattants (grenades de formes variées, canons de tranchée), auxquels l'ennemi eut l'exécrable idée d'ajouter plus tard les gaz asphyxiants et leur lance-flammes.

 

Le JMO (Journal des Marches et Opérations) de la 53ème division d’infanterie, mentionne, fin décembre 1914: « Les Allemands sortent des tranchées dans le secteur 110 entre 12 h et 12 hs 30, en faisant des gestes amicaux et en offrant des cigarettes et des cigares en l’honneur de Noël ». Les faits ont lieu au sud de Fricourt. Le 228ème RI était dans le secteur. Les faits sont aussi relatés dans le journal de la brigade mais pas dans celui du 228ème RI.

 

Fin avril, le 228ème RI est dirigé dans le Pas de calais et, du 10 mai au 28 juin, il participe à le 2ème bataille d’Artois.

 

Pendant la première période d'offensive, le régiment est mis successivement à la disposition de plusieurs divisions, et coopère à un certain nombre d'opérations dans la région de la Targette et de Neuville-Saint-Vaast.

 

Le 15 mai, il prend part à l'attaque des tranchées au nord-ouest de Neuville et y perd 1/6 de son effectif (environ 350 hommes). Le Colonel commandant la 78ème brigade lui adresse ses félicitations pour «la crânerie avec laquelle il effectua sa progression sous le feu violent de l'artillerie et de l'infanterie ennemie».    

<<<< Le "labyrinthe" était un système de tranchées et de fortifications allemandes au nord d'Arras. Il y a des abris-caverne bétonnés, des blockhaus pour mitrailleuses, des réseaux de fil de fer dissimulés; c'est une véritable forteresse. La distance entre les lignes françaises et allemandes est plus grande, 200 m, rendant l'approche meurtrière. La reconquête de l'ouvrage commence le 30 mai 1915 par une entrée dans l'ouvrage puis des combats "boyau par boyau" jusqu'au 16 juin.

"dans ce terrain bouleversé, où chaque coup de pioche déterre un cadavre, on ne peut aménager que lentement les abris profonds qu'exige la situation."

Le 7 juin, le 6ème bataillon enlève brillamment le fameux bastion de «la Salle des Fêtes», où il parvient à se maintenir, au prix d'efforts inouïs; ce qui ne l'empêche pas, 3 jours après, de se porter encore en avant et d'établir sous le feu très violent de l'ennemi une nouvelle ligne à proximité du boyau d'Eulembourg, puissamment défendu.    


 

Ce n'est que le 27 juin à 22h, le 228ème RI quitte les tranchées de Maison neuve et est définitivement relevé. Pierre Jacques DURAND rejoint son nouveau régiment le 28 juin avec 87 autres hommes et un lieutenant ou le 30 juin avec un contingent de 49 autres hommes, à Agnez les Duissans.

Le 4 juillet le régiment embarque en chemin de fer pour Chatel s/Moselle. Le 6 le régiment prend ses positions à Saint Genest. Arrivée d’un nouveau contingent de renfort de 92 hommes «dont 49 insuffisamment formés» (dixit le JMO)

 

Le 18 juillet le 228ème est affecté dans la région des Vosges où «l'enchanteur séjour» de Granges s/Vologne permet d'oublier un peu pendant 2 mois toutes  les fatigues passées. Le 19 août le régiment s’installe dans la région de Vaxoncort, Hadigny, Zincourt au nord d’Epinal.

 

Le 31 août, le Colonel, blessé le 17 mai, remis de sa blessure reprend le commandement de son régiment qu'il ne devra plus quitter jusqu'à sa dissolution.

 

 

 

Le 3 septembre, le régiment s’embarque en train pour le secteur de Levoncourt et Gimécourt. Le 17, 18, 19, 20 septembre le régiment fait mouvement à pied et de nuit pour Saint Jean s/Moivre (sud-est de Chalons). Le 23 il bivouaque au nord de La Croix en Champagne. Le soir du 24, le régiment se poste sur la «voie romaine» au sud-ouest de Hurlus. 

 

Le 25 septembre 1915, il est engagé dans la 2ème bataille de Champagne. De toutes les offensives exécutées par le régiment, l'attaque de Champagne est peut-être celle qui fût la plus dure et la plus meurtrière !

  


Le premier jour de l'attaque, le 228ème se trouve en réserve. A 11h30, il se dirige vers le «bois des caissons», puis au sud du «bois du Paon» (2km au nord de Perthes) sous la pluie, à travers les terrains bouleversés par les bombardements, rendant la marche infiniment difficile. Il y arrive à 22h. Le 26 toujours en réserve il avance vers le «bois des perdreaux». Le 27 septembre le 6ème bataillon est positionné à la carrière et au sud de la route Tahure–Souain. Aux «3 sapins» le 6ème bataillon passe en première ligne sous un déluge d’artillerie lourde. Il s’installe dans les tranchées, situées au-delà de la route Somme Py–Tahure. Le 28 le XVIème CA attaque les tranchées «de la Vistule» et de «l’œil de Crocodile», une brèche est ouverte. A 16h, le 6ème bataillon du 228ème RI attaque, par l’ouest, la butte de Tahure et la cote 192, située 600 m au nord. Il reçoit des gaz asphyxiants et ne progresse que de 600m, ses premiers éléments sont arrêtés à 30m des barbelés allemands, les tirs de préparation n’ayant pas suffisamment détruits les défenses allemandes. Il se retranche sur place. Il est relevé la nuit par le 5ème bataillon.

Les 29 et 30 septembre le régiment se maintient et consolide ses positions. La  belle  attitude  du  régiment,  au  cours  de  ces  journées  lui  valut  les  félicitations  du  général, commandant la 53ème division.

 

Le 228ème est relevé dans la nuit du 30 septembre au 1er octobre. Il reste au repos dans le “bois des liaisons”.    

Dans la nuit du 4 au 5 octobre, le régiment prend position dans le “bois des Taupes” pour le 6ème bataillon et le “bois des Eperviers”; Les 6 et 7 octobre le régiment reste en place et tente d’améliorer ses tranchées, sous une pluie d’obus.

 

Le 8 octobre, le 19ème R.I. ayant mis pied sur la lisière du bois dit «de la brosse à dent», le 5ème bataillon du 228ème est chargé de prendre la suite et de consolider la position. Dans un assaut à la baïonnette, les 17 et 18ème compagnies enlèvent une partie du bois de «la Brosse à dent», son lieutenant est sérieusement blessé. Malgré cette vigoureuse attaque, l'ennemi résiste à l'extrémité du bois et s'organise fortement dans les nombreux abris de ses anciennes positions d'artillerie. A 19h, le 6ème bataillon occupe le secteur en seconde ligne. Les 9 et le 10 octobre, le régiment conforte les boyaux, sous de violents bombardements.

 

Le 6ème bataillon passe en première ligne dans la nuit du 10 au 11. Le 11, après une préparation d’artillerie de 10mn, le 6ème bataillon attaque les derniers nids de résistance à l’est du bois de la brosse à dents. A 15h, c'est aux hommes de la 24ème compagnie renforcés des section a et b de la 23ème compagnie (voir ci-contre) qu'échoit «l'honneur» de prendre d'assaut ce nid de résistance, dénommé le «Chapeau de Gendarme». L'opération est vigoureusement menée, et elle se rend maîtresse du terrain, faisant un grand nombre de prisonniers.

 

C’est aussi lors de cette attaque que Pierre Jacques DURAND, le petit soldat de 1m52, qui avait été rattrapé par la dévoreuse d’hommes en juin 1915, est tué à l’ennemi après seulement 3 mois et demi passé au front. Le JMO pour cette seule journée indique 1 officier tué, 196 hommes disparus mais laisse en blanc le nombre de tués et de blessés.    


Cote 188                                                                                                                Bois de la brosse à dent

Pierre Jacques DURAND est tué à l’ennemi le 11 octobre 1915, lors de l’attaque du bois de la Brosse à dents sur la commune de Tahure (Marne)

 

Les autorités militaires (base du SGA Sépulture de guerre) ne semblent pas connaître son lieu de sépulture.

 

Il y a pourtant dans la Nécropole nationale de Jonchery s/Suippes une tombe individuelle n°3965 d’un Pierre DURAND du 228ème RI, mort le 11 octobre 1915 (Cl 1905/matricule 240/ St Gaudens - Toutefois la liste alphabétique de St Gaudens 1905 ne confirme pas l’existence d’un Pierre DURAND et le registre matricule semble avoir disparu. De même, aucune fiche SGA ne confirme l’existence de ce Pierre DURAND). Il est donc fortement probable que cette tombe soit celle de notre Pierre Jacques DURAND, mal référencée.    

Son acte de décès est transcris le 1 juin 1917 sur le registre d’état-civil de la commune de Saint Nazaire sur Aude

 

Son nom est gravé sur le monument aux morts de Saint Nazaire sur Aude